Tranches d'Histoire

Les Burgondes

Dans Le Crépuscule de l’aigle, ce peuple méconnu est mis à l’honneur au travers des personnages d’Adalide et de Faramond. Zoom sur ce peuple oublié des cours d’histoire :

Un peu de chronologie :

  1. Qui sont-ils et d’où viennent-ils ?

Durant le Ier siècle, la Germanie est peuplée de petits groupes indépendants, qui forment plus des clans ou des familles élargies que de véritables peuples. Il est probable que les Burgondes existaient déjà auparavant, issus de l’ile danoise de Borholm. Lorsqu’ils apparaissent dans un texte, Pline l’Ancien, les place au bord de l’Oder, dans l’actuelle Pologne. Peuple germanique, on retrouve chez eux des éléments communs à leurs voisins : vocabulaire, droit, etc. Au niveau génétique, il est difficile d’identifier un marqueur, car il semblerait que les Burgondes aient assimilé d’autres peuples.

  1. Un peuple migrant

Au gré des attaques ennemies, les Burgondes sont amenés à migrer vers l’Ouest. Au IIIe siècle, ils s’installent alors sur le Main, adoptent l’arianisme (oui, avec un « i », j’insiste), une branche du christianisme, et se dotent d’une famille royale.

En 409, ils s’installent dans l’Empire romain, près de Worms, profitant d’un gros mouvement migratoire des peuples barbares et d’une fragilité dans les défenses romaines. En échange de leur soutien militaire, leur territoire est reconnu : ils deviennent des Fédérés.

En 435, le roi burgonde Gondichaire fait un mauvais calcul. En voulant s’étendre, il pousse ses hommes sur l’actuelle Belgique. La réponse ne se fait pas attendre. L’empereur envoie son général Aetius qui leur inflige de très grosses pertes. Cet épisode serait même à l’origine du récit des Nibelungen, un épisode central de la culture allemande.

  1. La Sapaudie

Bien que fortement réduit, le peuple des Burgondes n’a pas fini de jouer son rôle dans l’histoire. En 443, Aetius les déplace dans une autre région, autour du Léman. Moins exposée, cette région nécessite tout de même une attention contre les attaques des Alamans, ennemis ancestraux des Burgondes. Protéger le plateau helvétique est essentiel : c’est une barrière entre les Barbares germaniques et la vallée du Rhône et les cols des Alpes. Cette zone est appelée la Sapaudie.

Les Burgondes sont loin d’être majoritaires. La population est surtout constituée de Gallo-Romains, parle le latin, dépend du droit latin et prie la trinité. En échange de leur protection, les Burgondes obtiennent une part des impôts (celle qui revenait normalement à l’Empire) pour leur entretien.

  1. La Bourgogne.

Vers 457, l’instabilité politique et militaire l’Empire pousse les cités à se placer sous la protection des Burgondes, leur royaume s’étend au point d’être divisé entre les deux héritiers du trône en 476. En 500, l’un d’eux procède à une alliance matrimoniale avec le roi des Francs : Clovis lui-même. En 532, les Francs prennent définitivement le contrôle du royaume burgonde. Clap de fin. Leur présence donnera toutefois son nom à la Bourgogne.

Sources: H. Ammann, K. Schib, éd., Atlas historique de la Suisse, 21958, p. 9; A. Furger et al., Die Schweiz zwischen Antike und Mittelalter, 1996, p. 51 © 2002 DHS et Kohli cartographie, Berne

Des barbares ?

  1. Un peuple cultivé

Oui, je sais à qui vous pensez depuis tout à l’heure. Et bien non, les Burgondes n’étaient pas de gros bouseux. Installés depuis le IIIe siècle au sein de l’Empire, ils s’étaient romanisés. Ils connaissaient le latin, étaient chrétiens (hérétiques, certes, mais chrétiens), possédaient une culture complète (chant, poésie, etc.).

D’ailleurs, le roi Gondebaud établit un texte de loi afin de favoriser la cohabitation avec les Gallo-Romains (les deux peuples n’avaient pas le même droit) : la loi gombette. En fait, il est très difficile d’identifier les tombes burgondes des autres tant le mode de vie était similaire. Le principal indice étant la place de la fibule, c’est dire !

En réalité, le portrait le plus grossier que nous avons d’eux provient de Sidoine Apollinaire, qui, mécontent de devoir les accueillir sous son toit, se lâche un peu.

  1. Le manque de sources les concernant

En fait, ils sont assez peu documentés dans un premier temps. Le manque d’intérêt des auteurs romains les concernant et la fragilité des documents n’ont pas aidé. De plus, en cette période de déclin de l’empire, il y avait plus grave ailleurs : Wisigoths, Vandales et Francs ont concentré davantage l’attention des Romains. Les sources pour les connaitre dépendent beaucoup de la génétique puis de l’archéologie. Or, comme je l’ai dit, leur mode de vie romanisé les rendait pratiquement invisibles lors des fouilles.

Offrandes provenant d’une sépulture féminine (tombe 57, Sur-les-Mausannes) à Saint-Sulpice (VD), vers 450/470 (Musée cantonal d’archéologie et d’histoire, Lausanne)

Sources :

Pour écrire cet article et plus particulièrement mon roman Le crépuscule de l’aigle, j’ai utilisé les travaux de trois chercheurs :

Justin Favrod, Les Burgondes, Presses polytechniques et universitaires romandes, 2022. (pour aller plus loin, je vous conseille ce dossier de la RTS)

Katalin Escher. Les Burgondes : Ve-Vie siècles apr. J.-C, éditions errances, 2006

Les Burgondes, une vidéo de La Prof, qui offre une bonne synthèse de vulgarisation.

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