J’ai toujours un peu de mal à l’idée de faire un retour de lecture d’un auteur ou une autrice francophone, car je trouve cela plus facile avec un livre étranger dont la réputation est suffisamment assise pour avoir été traduit. C’est d’autant plus juste quand mon avis est négatif. Je devrais peut-être m’abstenir, mais en même temps, ce roman soulève plusieurs problématiques qui pourraient servir aux autres auteurs. Et puis, j’ai aussi le droit de donner mon avis. Alors voilà :
- Contexte d’achat :
Il y a peu, j’ai reçu un mail de Kobo me vantant une grosse promo. Une maison d’édition que je connais faisait une remise de 50 % sur ses ebooks. Comme je partais en vacances avec ma liseuse, il fallait bien que je la remplisse. Et puis, je dois aussi lire davantage de romans historiques pour voir ce qui se fait. J’ai donc sauté sur l’occasion et acheté 5 romans, dont Cueilleuse de thé, de Jeanne-Marie Sauvage-Avit.
- Résumé :
« Prix du Livre romantique »
Au Sri Lanka, l’ancien Ceylan, Shemlaheila, est cueilleuse de thé dans une plantation. Depuis dix ans déjà, elle ploie sous les lourds sacs de feuilles de thé et sous le joug des contremaîtres, mais, à l’aube de ses vingt ans, la jeune femme a d’autres rêves. Elle est bien décidée à partir, à échapper à la condition de celles qui, dans les théiers et dans les maisons, sont au service des hommes. Elle ne sera pas cueilleuse de thé toute sa vie, comme sa mère, comme toutes ces femmes asservies qui n’ont d’autres horizons que les interminables rangées de théiers… Du Sri Lanka à Londres, à la découverte d’un pays complètement différent du sien, Shemla va découvrir une autre culture, d’autres personnes et surtout d’autres envies. La cueilleuse de thé qu’elle a toujours été choisira-t-elle de revenir au pays, ou de se créer une nouvelle vie ?
- Les points positifs :
Si je n’ai pas été convaincue de ma lecture, je dois au moins reconnaitre le mérite à l’autrice de se pencher sur les conditions de vie des cueilleuses de thé. Derrière la jolie photo prise par les touristes se cache une réalité sombre de femmes exploitées et abusées. Hors de la plantation, ce n’est pas mieux concernant les droits des femmes, les mariages arrangés et les travailleurs qui acceptent ce qu’ils trouvent. L’autrice s’intéresse à une autre forme d’exploitation concernant les immigrés en Occident. Pour écrire son roman, elle a des articles sur ce thème. Je dois reconnaitre qu’elle a travaillé le sujet.
4. Mon avis :
Shemlaleila est belle. Si vous ne l’avez pas encore compris, alors tous les autres personnages qu’elle croisera le lui répèteront. Hommes, femmes et enfants. Sans exception. C’est sans doute l’un des plus gros soucis de ce livre. Shemla est trop parfaite : belle, douce, extrêmement douée (elle apprend l’anglais en 15 jours, sait absolument tout faire) et tellement gentille qu’elle se fait exploitée sans rien dire. Ah oui, elle est bouddhiste. A priori, cela justifie sa passivité face aux tous les coups durs.
Une fois en Angleterre, Shemla se fait exploiter : bonjour travail au noir et esclavage moderne. Et absolument aucun de ses proches ne lui fait part de ses droits, même son amie avocate. Ce n’est pas grave, elle est au-dessus de ça (vu qu’elle est bouddhiste). Un autre point noir concerne les personnages un brin caricaturaux: les hommes en Inde et au Sri Lanka sont lubriques et abusifs, heureusement que les Anglais savent se tenir… Les Anglaises sont de riches femmes qui exploitent le personnel de couleur et n’aspirent qu’à des mariages prestigieux et sans amour… Personne ne se rebelle dans ce petit monde.
Je sors donc de ma lecture déçue, en grande partie parce qu’elle n’a pas été celle qu’on m’avait vendue. La cueillette du thé n’est qu’à peine abordée à l’échelle du livre et que l’autrice reste trop superficielle dans la description des sentiments. Le seul personnage dont on a pleinement les pensées et sensations physiques est un violeur pédophile, et je m’en serai bien passée ! Car c’est véritablement là le cœur de l’histoire : un homme répugnant qui agresse les femmes impunément dans les plantations de thé et la fuit d’une de ses victimes jusqu’à sa vengeance qui sort de nulle part. Nous sommes loin du livre romantique annoncé !
5. Pourquoi ça n’a pas fonctionné avec moi.
À mon avis, le roman souffre de plusieurs faiblesses, voire erreurs, qui m’ont sortie de ma lecture :
– la rupture du pacte de lecture. Est-ce la faute de l’autrice ou de la maison d’édition ? Bonne question. Toujours est-il que la couverture douce, le bandeau « prix du livre romantique » et le résumé annonçaient une histoire plus douce. Finalement, il n’y a pratiquement pas de romance et je n’ai rien appris sur la culture de thé.
– des personnages sans nuances et peu réalistes.
– la culture du viol. Encore et toujours. Si l’autrice veut mettre en danger un personnage féminin, hop, un viol ou une tentative. Au final, le roman est bien plus sombre et dur que ce que je recherchais pour une lecture du soir en vacances. Honnêtement, si je l’avais su, je ne l’aurais pas acheté.
– un manque d’immersion dans les sentiments et les sensations. J’aurais aimé sentir l’odeur du thé, toucher la rosée, connaitre les sentiments de Shemla, sentir la colère et la peur de Pokonaruya…
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