Le 31 octobre approche et avec lui la fête d’Halloween. Dans la tradition gaélique, les portes s’ouvrent avec l’Autre monde et, le temps d’une nuit, ses créatures errent parmi nous. Mais à quoi ressemble-t-il ?
Dans la tradition celtique, il n’est pas question de paradis ou d’enfer. On parle simplement d’un autre monde. Les informations que nous avons le concernant proviennent essentiellement de deux traditions : galloise et irlandaise. Cependant, on retrouve des traces similaires dans le folklore breton. La mise par écrit des récits oraux durant le Moyen âge, avec une teinte chrétienne plus ou moins marquée, nous permet d’avoir une idée des mythes antiques de cette région. À cela s’ajoute un motif récurrent dans les récits irlandais : l’imrama (« voyage »). Ce topos relate le voyage d’un héros dans l’Autre monde.
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Le Sidh irlandais.
Dans les mythes irlandais, l’Autre monde s’appelle le Sidh. C’est la résidence des Dieux, les Tuatha de Danann, ainsi que celles des Fomoires, (plus d’infos ici).
Le Sidh se compose de plusieurs régions : La Plaine du Plaisir (Mag Meld), la Grande Plaine (Mag Mor), Tir nambéo (Terre des Vivants), Tir na mban (Terre des femmes), Tir na nog (Terre de ceux qui sont jeunes) et Tir Tairngire (Terre des Promesses).
Plusieurs héros s’y rendent, à l’instar d’Aengus, amoureux de la fille du roi de l’Autre monde. La jeune fille est changée en cygne et Aengus doit la reconnaitre pour l’épouser.
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L’Annwynn gallois.
La mythologie galloise diffère assez peu de celle de l’Irlande. Il s’agit d’une branche de la culture gaélique. Les dieux et les héros sont très proches, même si les noms diffèrent. Nous la connaissons en grande partie grâce au Mabinogion, appelé les Quatre branches du Mabinogi . Il s’agit de contes médiévaux écrits au XIVe siècle qui seraient une mise à l’écrit des récits oraux transmis par les bardes. L’Annwynn est également mentionné par le poète Taliesin (VIe siècle).
Dans les récits gallois, l’Autre monde s’appelle annwnn (orthographié annwynn ou annwenn). Il faut également noter que le monde des morts breton s’appelle l’Anaon.
Comme le Sidh, il est perméable et plusieurs héros s’y rendent. Le plus connu est Pwyll, qui, lors d’une chasse fait la rencontre avec Arawn, le roi de l’Autre monde. En conflit à propos de la proie, ils échangent leur royaume durant un an. Un autre récit célèbre raconte comment Culhwch (ne me demandez pas comment ça se prononce), s’éprend d’Olwen, la fille d’un géant de l’Autre monde. Le héros doit accomplir 17 tâches pour obtenir la main de sa bien-aimée.
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Comment s’y rendre ?
Dans la majorité des récits, on accède à l’Autre monde par les voies souterraines. On raconte que les pierres dressées ou les tumuli sont des portes.
On retrouve également des points de passage liés à l’eau. Soit au fond des lacs, des marais, voire encore de l’océan, soit au-delà des mers. L’Autre monde n’est pas forcément souterrain, mais également une île, lorsque l’on y accède par bateau comme dans la navigation de Saint Brendan, de Maeldunn ou encore le lieu de repos du roi Arthur.
Ce qu’il faut surtout retenir, ce sont surtout des passages difficiles (fond de l’eau, souterrains cachés etc…) qui limitent l’accès. Cependant, la mort n’est pas une condition nécessaire au voyage.
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Quand voyager ?
En fait, ce n’est pas tant ‘comment s’y rendre’ qui intéresse, mais ‘quand’. Sur ce point, les récits s’accordent sur un point : lors de la Samain. Cette fête du calendrier celte marque à la fin de l’été et l’ouverture des frontières entre les mondes. On peut y voyager dans les deux sens, même si le reste de l’année, les devins et les druides peuvent s’y rendre par l’âme et que la magie circule.
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Comment c’est là-bas ?
L’élément le plus récurrent concernant les créatures de l’Autre monde est la blancheur. Les chiens rencontrés lors de la chasse de Pwyll sont blancs, et les aventuriers mythiques rencontrent souvent un animal de la même couleur. D’ailleurs, Etain, l’amour d’Aengus, n’est-elle pas un cygne blanc ?
Enfin, Bran Mac Febail, découvre une branche argentée aux fleurs blanches qui se transforme en messagère (identifiée parfois comme une banshee) et le pousse à voyager dans le Sidh.
Une autre caractéristique est la temporalité, extrêmement lente voire inexistante, selon les récits. Dans le conte, Bran pense rester un an sur la Terre des femmes après avoir bu une coupe, mais lors de son retour en Irlande, personne ne le connait, car plusieurs années se sont écoulées. De plus, Tir na nog, la Terre de la Jeunesse se comprend comme un lieu sans vieillissement.
Enfin, l’Autre monde est aussi celui de l’abondance. Outre son gibier et ses pommes qui reviennent souvent dans les récits, c’est aussi là que se trouve le chaudron magique qui nourrit le banquet permanent.
En fait, ce monde pourvoit à tous les besoins.
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La christianisation du mythe :
Évidemment, ces histoires de créatures, de mondes magiques et de légendes ne sont pas très compatibles avec le dogme chrétien. Si le folklore païen perdure davantage dans les cultures celtiques, il n’en demeure pas moins qu’avec le temps, les moines copistes et les prêtres ont christianisé un peu tout ça. Les créatures de l’Autre monde sont devenues plus négatives, et ont été appelées ‘démons’. Car si les Fomoires sont parfois décrits comme ‘monstrueux’ (mais également ‘beaux’), il s’agissait à l’origine de surtout de créatures magiques. L’Autre monde s’est aussi assombri et desséché avec le temps.
Je reviendrai une autre fois sur la date du 31 octobre et sa récupération par l’Église.
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La Terre des héros
Ceux qui ont lu ma trilogie ont peut-être déjà reconnu quelques motifs de mon univers. Pour les Gaëls, mon peuple celte, La Terre des héros est cet Autre monde. Aleya, comme d’autres héros avant elle, y pénètre.
Les Tumuli, la Plaine de Mag Mor, les Fomorrs et l’Anwynn sont des points que je réutilise dans ma trilogie, ainsi que cette date fatidique de la Samain. Dans ma trilogie, je me suis amusée à explorer ce mythe de l’Autre monde.
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