Peut-être vous êtes vous déjà demandé pourquoi, dans les récits, il se passe autant d’actions en forêt. Tout d’abord, sachez que c’est un motif littéraire très ancien qui fait de ce lieu une source de dangers, d’aventures et parfois de rencontres mystiques. Cependant, il existe plusieurs idées reçues auxquelles il faut faire attention pour ne pas tomber dans l’incohérence.
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La forêt, un état naturel du monde
On l’a sans doute oublié de nos jours, mais la forêt est l’état des lieux naturel dans nos contrées. L’exploitation agricole et le développement des lieux d’habitations se sont faits au détriment des bois. Pour s’installer quelque part, il fallait auparavant défricher, et donc déboiser un espace. Si on laisse un lieu à l’abandon, un siècle plus tard, il y aura des arbres hauts de plusieurs mètres. Si votre récit ne se passe pas à notre époque, c’est ce paysage qui dominera, à moins qu’un élément climatique ou géologique justifie le contraire (vent, désert, température, etc.).
Il est donc logique que dans un monde peu industrialisé et peu peuplé, la forêt représente la majorité du territoire, et par conséquent, le lieu par excellence pour l’action.
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Un monde sauvage et malfamé.
Dans les textes antiques, il n’est pas rare qu’un héros fasse la rencontre d’un être mystérieux ou bien d’un animal dangereux en forêt. Pourtant, ce sont les textes médiévaux qui vont insister sur ce motif littéraire, et ce dès les textes hagiographiques (les vies des saints).
Au Moyen-âge, l’espace est structuré en trois cercles concentriques, allant du lieu le plus familier (la maison, le village, la ville…), à l’inconnu lointain en passant par le monde sauvage. La forêt, espace sauvage par excellence, entoure donc la sphère connue. C’est même le cercle en contact immédiat avec celui de la civilisation. Naturellement, le passage des frontières est nécessaire, mais pas sans risque. L’homme a en effet parfois besoin de franchir la limite pour aller d’un lieu à l’autre, chasser ou encore emmener ses porcs pacager.
Dans la forêt vivent des bêtes sauvages parfois proies, comme le gibier, et parfois prédatrices. Aller en forêt, c’est donc prendre un risque, quitter le monde connu et organisé pour aller dans le monde indompté. J.K.Rowling utilise cette idée dans Harry Potter avec la Forêt interdite. Les transgressions répétées de Harry et ses amis leur valent souvent des ennuis.
On peut aussi penser au petit chaperon rouge, dont la traversée de la forêt lui vaut une bien mauvaise rencontre.
En forêt vivent également les marginaux, ceux qui ne respectent pas les lois, vivent comme des bêtes ou ne sont pas soumis à l’ordre établi. S’y rendre, c’est aussi encourir le risque de se faire détrousser par des brigands, ou pire. Pourtant, c’est aussi là que se cachent Robin des bois et ses compagnons rebelles, marginaux par excellence.
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Décrire une forêt dans un roman :
La forêt est un décor à part entière. Si vous l’avez choisie comme cadre pour une action ou même pour un roman, vous devez la définir avec soin. Celle-ci peut changer selon :
- L’intervention de l’homme. On parle de forêt primaire, ou de forêt vierge, lorsqu’il n’y a pas eu d’actions de l’homme ni destruction de la forêt pour d’autres raisons (incendies, etc.). Si votre histoire se passe avant le XIXe siècle ou bien dans un monde qui a peu entamé le défrichement, vos forêts ressembleront à des forêts primaires. Les arbres y seront centenaires, avec différentes essences, et les espacements seront irréguliers. Il en reste très peu dans ce monde. On parle de forêt secondaire quand il y a eu refonte de la forêt soit par replantage, soit naturellement. Bien souvent, les coupes de bois changent le caractère des forêts, c’est pourquoi elles ne sont plus primaires. Peut-être que votre récit se déroule dans le cadre d’une sylviculture. Dans ce cas, le paysage est particulier avec des plants plus réguliers et parfois une monoculture.
- La géographie. L’altitude joue sur les essences présentes dans votre forêt (conifère et feuillus, vous vous souvenez ?). C’est aussi le cas pour le climat, la température ou encore la topographie. Il existe des paysages forestiers intéressants à reprendre. Un petit passage sur pinterest et vous aurez de belles idées.
Il n’y a pas que les canopées qui constituent les forêts. Les types de sous-bois (futaie, taillis, taillis sous futaie) mais aussi les plantes présentes complètent le paysage. Mettez-y des fougères, des fleurs, des ronces, de la mousse ou des feuilles mortes.
Tout ce paysage a une odeur, et même plusieurs : le parfum des fleurs, humus, les excréments des animaux sauvages ou encore la charogne d’un animal en décomposition.
Enfin, la forêt grouille de vie. Le gibier côtoie les oiseaux et une multitude d’insectes différents. Les mentionner, ne serait-ce que par petites touches, enrichit considérablement votre décor.
Ajoutons enfin qu’une forêt est une source de nourriture, pas seulement en raison de son gibier. On y trouve des champignons et des baies sauvages, à condition de savoir bien les choisir, naturellement.
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Les dangers
- Évoluer dans la forêt. À moins de marcher sur une route tracée ou un sentier, ce qui est possible, il est assez difficile d’évoluer en forêt. Les branches, le sol irrégulier, et les arbres plantés aléatoirement ralentissent la progression. Il faut souvent zigzaguer et contourner. L’humidité rend le sol boueux et les flaques s’évaporent moins bien qu’en terrain dégagé. Votre personnage peut donc s’enfoncer. À cheval, c’est encore pire. À hauteur de branches, le cavalier devra souvent mettre pied à terre ou avancer lentement. Vous oublierez donc le galop en dehors des routes.
- Se repérer. Il est facile de se perdre en forêt. Tout d’abord, le soleil caché par les feuilles et la luminosité rendent plus difficiles l’appréciation du temps qui passe et l’orientation. De plus, l’absence de paysage dégagé ne permet pas de se fixer un repère (une maison, un clocher…) et de s’y tenir. Les arbres se ressemblent, et on peut très bien se perdre.
- Les mauvaises rencontres. Comme dit plus haut, la forêt est le lieu de vie du sauvage. Il y a des rencontres dont on se passerait bien : un ours, un loup ou encore un sanglier par exemple. De plus, il est facile de se cacher en forêt. Votre personnage peut donc tomber dans un guet-apens tendu par des brigands ou une troupe ennemie. Enfin, vous vous exposez aussi aux accidents de chasse.
- Devenir fou. Il y a beaucoup de bruit en forêt qui peuvent rendre paranoïaque un personnage poursuivi. Ajoutons à cela qu’il a du mal à se repérer et peut très bien s’être perdu, le tout avec le danger environnant, il a de quoi paniquer.
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Les clichés à éviter
- La forêt uniforme. Une forêt, ce n’est pas simplement un enchaînement d’arbres à intervalle régulier. Il y a différents types d’arbres, de tailles différentes. Les jeunes pousses côtoient des chênes séculaires. On trouve également des arbustes, des aspérités, des branches à hauteur différentes.
- La mousse au nord. Pour les petits malins qui disent qu’il suffit se s’orienter grâce à la mousse sur les arbres, sachez que c’est faux. Elle pousse à l’endroit le plus humide. Selon le terrain, le vent ou les conditions d’ensoleillement, la mousse poussera dans une autre direction. Oubliez donc cette astuce qui n’en est pas une.
- Le super traceur. Les animaux sont bien meilleurs que votre personnage pour se repérer ou avancer en silence (sauf s’il est entraîné dans ce sens). Il y a fort à parier que ce seront eux qui le trouveront (ou s’enfuiront) avant lui. Il faut aussi être très silencieux et sur ses gardes.
La forêt est un cadre formidable pour placer une action. Elle peut être calme et domptée, sauvage et inquiétante ou encore naturelle et mystérieuse. Parfois, la forêt est même un personnage à part entière, comme dans le Seigneur des anneaux de J.RR. Tolkien.
Nul doute qu’entre les troncs d’arbres se cachent des secrets et des dangers tout droit sortis des contes et de votre imagination. À vous de vous amuser avec elle.
2 Comments
Bilan de juillet 2019 – amelie hanser, auteur
août 1, 2019 at 1:06 am[…] article sur la forêt a connu un joli succès, ce qui me m’encourage à écrire d’autres articles de ce […]
Bilan de juillet 2019 - Amélie Hanser, écrivain
mars 14, 2020 at 12:05 pm[…] article sur la forêt a connu un joli succès, ce qui me m’encourage à écrire d’autres articles de ce […]